Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/226

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Comment veux-tu que je ne t’aime pas ? Oui, je t’écouterai toujours à présent. Il y a des choses que je sais bien voir quoique je n’aie pas d’esprit. Je vois bien comme tu t’occupes de moi, comme tu voudrais faire « gagner » mon caractère et combien de choses tu m’apprends tous les jours. Oh ! non, tu ne sais pas combien tu es bon !

Certes l’admiration de Lévise était la plus grande, la plus délicieuse récompense pour Louis, et elle essuyait bien des soucis.

Le jeune homme commençait aussi à éprouver une forte haine contre les gens de Mangues, une violente envie de leur faire payer leurs insultes contre la bien-aimée Lévise. Il se dit qu’il imposerait de force ou de gré à « toute cette racaille » Lévise comme sa maîtresse, et, que cela leur plût ou non, il leur tiendrait tête à outrance jusqu’à ce qu’ils eussent renoncé à toute hostilité. Il avait le sentiment exagéré de son rang comme homme d’une classe, d’une race même supérieure, et il se promit de ne plus s’affecter des opinions, des paroles ou des actes des paysans, mais de les mépriser entièrement et de n’en tenir aucun compte. Cela lui était possible extérieurement, mais à l’intérieur ! Il ne s’apercevait pas que l’amour-propre le conduisait seul dans ce projet de guerre. Du reste l’opinion commune, générale, l’avait toujours révolté, et il n’était pas prêt à céder à une improbation publique, de quelque part qu’elle vînt. Il l’eût bravée avec une raideur du diable s’il avait été seul en cause. Et tous ses troubles n’allaient provenir que de Lévise ! Ce n’était qu’en elle qu’on allait le blesser.