autour d’eux, et un murmure courut successivement tout le long de la foule. Louis avança, ouvrant le passage avec des yeux décidés, menaçants, qui indiquaient d’avance qu’on eût à se reculer. Il conduisit ainsi Lévise jusqu’au milieu du chœur, accompagnés d’un bourdonnement de voix ennemies. Le banc d’honneur était un peu devant eux, occupé par cinq ou par six personnes dont les têtes se penchaient en arrière par-dessus le dossier pour reconnaître la cause de ce bruit. Les personnages importants ainsi placés se parlèrent vivement dès qu’ils eurent reconnu les nouveaux arrivants. Le bourdonnement croissait. La messe était finie, le curé prenait quelques instants de repos avant de monter en chaire.
Louis fit un pas vers le banc d’honneur, mais Lévise, à bout de forces, se cramponna des pieds aux dalles, arracha son bras à celui du jeune homme, et se jeta sur une chaise où elle s’agenouilla baissant le plus possible la tête pour se cacher. Louis se tourna de tous côtés, considérant dédaigneusement tous les visages dirigés vers lui. Tandis que Lévise souffrait un terrible supplice, il ressentait un bonheur aigu. Il était arrivé à ses fins. Il tenait en échec tout ce monde murmurant et le forçait à subir à son tour l’humiliation. Il domptait ces gens et jouissait de leur colère et de leur impuissance. Il oubliait Lévise. Il avait enfin conquis un moment de joie âpre depuis quinze jours qu’il vivait dans les épines, sur les charbons ardents.
L’amour ne lui avait peut-être pas apporté de plaisir comparable, un plaisir rude et fortifiant.
Un double mouvement se fit parmi les assistants, les uns s’occupèrent du curé qui montait en chaire, les autres dirigèrent toute leur attention vers la grande porte où un nouveau murmure montait à la voûte.