Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/329

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Le bruit des grelots, le roulement d’une voiture résonnèrent. Bientôt la carriole de l’aubergiste portant son maître, le capitaine et le garçon d’écurie arriva devant la porte.

Les nouveaux venus furent surpris de se trouver entourés par les cinq ou six paysans qui revinrent sur la route en entendant la voiture s’arrêter.

— Qu’y a-t-il donc ? demanda le capitaine.

— Vous venez trop tard ! répondit-on en le voyant prêt à frapper à la porte, ceux qui sont là-dedans sont partis pour…

— Comment, partis ! interrompit-il avec anxiété.

— Vous n’avez donc pas entendu qu’on a tiré deux fois !

Le capitaine resta foudroyé.

— Ah ! les malheureux enfants ! s’écria-t-il, moi qui leur avais dit qu’il n’y avait rien à craindre !

Ils retournèrent tous derrière la maison. Le capitaine se fit hisser par les paysans jusqu’à la fenêtre. La vue des deux corps étendus à travers la chambre lui causa un tressaillement. L’émotion l’arrêta. Puis la vieille décision militaire reprit le dessus. Il enjamba la barre d’appui, et alla aux victimes, les tâta tour à tour. Le sang sortait par flots épais et lents, par gouttes énormes des blessures, puis ruisselait le long des vêtements.

Les paysans entrèrent successivement derrière lui. Il essaya de bander les plaies, à tout hasard, fit transporter les jeunes gens sur la voiture qui ne devait pas être un char funèbre et sur laquelle il croyait les emmener vivants et joyeux. On se dirigea vers la mairie, parlant à haute voix de ce terrible événement. Des fenêtres s’ouvrirent sur le passage du cortège, et, du fond de l’obscurité des voix interrogèrent sur ce qui se passait.