Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/50

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les choses autrement que par leur nom, il satisfaisait ses scrupules, et se donnait par là le droit de ne pas faire d’efforts réels pour se priver de ce qui était son bonheur, quoiqu’il le regardât aussi comme un mal pour l’avenir.

Louis fut très tourmenté, dès qu’il fut seul, par la pensée que Volusien frappait Lévise. Cette jolie fille, naïve, aimable, resterait donc exposée aux brutalités de ce grand coquin, son frère ! Pouvait-il donc se trouver un être assez grossier pour ne pas comprendre que cette fleur sauvage, mais pleine de parfum, devait être soignée délicatement ? Comment concevoir le dessein de frapper, de froisser même une créature gracieuse, qui semait la joie, le sourire autour d’elle, et qui avait besoin de protection et de bonté ?

Louis s’attendrit sur le sort de cette fille demeurée sans parents, sans appui, abandonnée et peut-être même poussée par son frère vers de dangereux hasards. Il se promit de la protéger contre ce garçon odieux, en même temps qu’il se promit « qu’elle ne serait jamais séduite » !

Et comment Louis, qui se faisait de si merveilleuses fêtes d’être amoureux et d’être aimé, et qui pleurait de chagrin autrefois de ce qu’aucune passion ne venait secouer et illuminer sa pesante oisiveté de jeunesse, comment Louis pouvait-il s’affirmer qu’il tiendrait une telle promesse, quelque loyale qu’elle fût ?

Louis redescendit auprès de la jeune fille.

— Voyons, lui dit-il, ne pouvez-vous m’avouer si vous êtes malheureuse par votre frère ? Vous venez de perdre votre tante, qui était un soutien pour vous. Si votre situation est pénible, il ne faut pas craindre d’en convenir. Il n’y a aucune honte là-dedans. J’ai été souvent très-heureux de trouver des gens qui m’écoutaient