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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/66

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— Vous avez pris une peine « énorme », dit-il. Si j’avais pu le prévoir, j’aurais sacrifié mon envie de fumer, plutôt que de souffrir que vous ayez même la pensée de vous écraser de fatigue comme vous avez fait ce matin.

— Ce n’est pas bien loin, dit-elle avec un sourire.

— Mon Dieu ! dit Louis avec un accent ému et où il y avait comme une plainte pour le mal qu’avait dû se donner Lévise.

Que lui servait-il de vouloir dissimuler puisqu’il le faisait si maladroitement ?

— J’ai trouvé le temps long, reprit Lévise, parce que je voulais être ici de bonne heure. Cela m’a fait prendre l’air, d’ailleurs, ajouta-t-elle gaîment.

Louis l’aurait embrassée. Il y avait dans ce visage riant et doux, embelli par la pensée de toutes ces petites délicatesses dont le jeune homme était redevable à Lévise, il y avait une attraction qui troublait Louis de plus en plus, l’étonnait, le portait à se raidir davantage et en même temps ne le lui permettait pas !

— Ah ! répondit-il, me voilà très-peiné. Je vous aurais peut-être priée de me faire une petite commission, à la condition de ne pas vous détourner de votre chemin. Mais vous voir aller à deux lieues, revenir, cueillir des fleurs, vous épuiser… c’est vraiment trop ! je suis furieux contre moi-même, je ne me pardonne plus mon plaisir…

Et, voyant qu’elle s’installait pour travailler, Louis ajouta :

— Mais il faut vous reposer… vous avez bien le temps de vous remettre à l’ouvrage.

Lévise ne discernait pas bien s’il était satisfait ou mécontent. Les paroles de Louis : Je suis furieux contre moi-même, inquiétaient la jeune fille.