Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/88

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manquer sa grande pastourelle. Il te croyait plus solide sur tes pattes.

— Je ne danserai plus jamais, répondit Lévise en se levant, je vais rentrer.

— À cause de ta tante, tu n’aurais pas dû venir.

— C’est vrai ! Mais cela a été plus fort que moi. D’ailleurs, je voulais danser pour la dernière fois.

Les deux femmes partirent ensemble. Louis était plein de joie. Il croyait comprendre que Lévise lui sacrifiait sa passion pour la danse. Il voulut suivre Lévise et son amie, mais des bandes de sept ou huit grandes sottes de filles qui tenaient toute la largeur des contre-allées du Mail, et bousculaient tout le monde en pouffant de rire, l’arrêtèrent deux ou trois fois et les lui firent perdre de vue.

Louis rentra enivré : l’amour de Lévise lui apparaissait bien clair, « ingénu » et délicat.

— « Ma » charmante Lévise ! murmura-t-il tout le long du chemin, employant le pronom possessif, dont il ne se fût pas cru le droit d’user auparavant. Il ne s’étonnait plus à présent de la rapidité avec laquelle il en était venu à faire « sienne » la jeune fille, qui lui avait inspiré d’abord tant de prudence et de réserve.

Le lundi, « sa » Lévise, puisqu’il l’appelait ainsi, étant arrivée, Louis imagina de se donner une nouvelle petite comédie en la tourmentant un peu. Les légères, mais premières pointes d’inquiétude jalouse qui étaient entrées la veille dans la chair de Louis quand il avait vu la jeune fille danser avec Cardonchas lui inspirèrent cette idée de faire passer Lévise à travers les mêmes épines à son tour.

Pour mieux savourer son divertissement, Louis fit tous ses efforts pour ne pas se laisser entraîner à descendre avant midi auprès de la jeune fille. Il était d’avance