cette violence doublement humiliante. Cependant ce mot de déshonorer l’écrasa un moment ; l’entendant dire par Aristide, elle pensa que ce devait être l’arrêt de toute la maison.
Son frère la traîna encore quelques pas. Mais alors la fierté d’Henriette reprit le dessus, elle se dégagea par un mouvement qu’elle donna de toutes ses forces.
« Ah ! tu m’as écorché ! cria Aristide en portant un doigt à sa bouche.
— Allez jouer avec Perrin, mon cher frère, le reste ne regarde que les gens qui sont en état de comprendre, » dit-elle avec mépris.
Peu s’en fallut qu’Aristide ne la frappât d’un grand coup de poing ; il la ressaisit plus fortement qu’auparavant, sans se soucier de lui faire mal ou non, et répondit : « Tu ne feras plus la fière à présent ! »
Aristide n’avait jamais dit de si grands mots de sa vie, il était enchanté de trouver une aussi belle occasion. Il ne manquait pas de vigueur, il força sa sœur à courir, et, au lieu de monter tout droit, il fit le tour de la maison pour passer devant la cuisine et montrer à Perrin et aux domestiques, aux gens enfin qui avaient quelque respect pour lui, combien Henriette était renversée de son piédestal.
Mais à la cuisine on ne saisit pas la signification de cette scène ; on crut que c’était un divertissement commun. Henriette ne cherchait pas à se débattre ; un moment elle faillit involontairement appeler Émile au secours, bien qu’il fût loin ; puis elle se laissa faire, mais remplie d’indignation d’être niaisement maltraitée par ce garçon imbécile et méchant. Elle en pleurait de colère.
Madame Gérard regardait par la fenêtre du salon, au moment où Aristide ramenait sa sœur de cette agréable manière.
« Ah ! voilà Aristide qui fait des sottises ! » s’écria-t-elle ; et elle sortit précipitamment au-devant d’eux.
« Depuis quand, demanda Henriette haletante, ce sot d’Aristide a-t-il le droit de se conduire brutalement avec moi ! Tiens, vois mon poignet. Aristide n’est pas assez intelligent