Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/179

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« Corbie a dû vous parler de mes intentions. Veuillez excuser cette démarche un peu brusque de ma part, mais je trouve tant de qualités et de beauté à mademoiselle votre fille, que je viens vous prier de m’accorder sa main. J’ose à peine me prétendre digne d’une pareille faveur, quoique je défie n’importe qui de surpasser mon admiration et mon affection pour mademoiselle Henriette.

— Monsieur, répondit madame Gérard, nous sommes fort honorés d’une alliance avec vous. Ma fille partagera nos sentiments. Elle est trop bien élevée pour ne pas être sensible, comme elle le doit, à votre demande, qui est flatteuse pour elle.

— Je désirerais vivement, dit Mathéus, que mademoiselle votre fille pût me connaître davantage. Je mets ma fortune à ses pieds. Je ne sais si je puis parler de mon cœur, mais il lui appartient également et il vaut celui de bien des jeunes gens. Sera-t-elle de cet avis ? Je ne lui demande que de ne pas me voir avec répugnance.

— Bien loin de là, Monsieur, je crois que personne ne peut mieux que vous rendre ma fille heureuse.

— Nous vous abandonnons là, dit Pierre, un trésor précieux. Henriette est toute jeune, Monsieur, c’est une charge bien grave. Dans nos bois, nous étayons les jeunes plantes : soyez à la fois son mari et son père. Protégez-la, préservez-la. »

Madame Gérard trouva que son mari entreprenait inopportunément de sermonner M. Mathéus, et elle reprit :

« Oh ! M. Mathéus est intéressé tout naturellement à s’occuper de sa femme.

— Madame, je l’aime et je l’aimerai beaucoup, répondit Mathéus. Je vous promets que si cela dépend de moi elle sera heureuse. Du reste, j’ai chargé Corbie de vous entretenir de toutes les conditions matérielles de mon union. Moi je ne veux mêler rien de vulgaire à ce qui est purement de l’âme et du cœur.

— Henriette est l’enfant des blés, dit Pierre, il lui faut la bonne terre de ce pays-ci pour prospérer.