Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/266

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Quelle corbeille ? dit-elle avec stupeur.

— Eh bien ! la vôtre, ma petite.

— Je n’ai point de corbeille, » s’écria Henriette, dont la voix éclata ; et elle s’éloigna brusquement, laissant la grosse femme pétrifiée.

Madame Gérard avait un air de dignité affligée, de tristesse comprimée, que la jeune fille remarqua bien en se retirant.

« Vous voyez ! dit madame Gérard à madame Baudouin, comme si elle contenait quelque grande douleur prête à faire explosion.

— Quelle mauvaise petite tête répondit celle-ci ; ma chère dame, j’admire votre patience.

— Il faut bien souffrir patiemment les épreuves d’en haut, » soupira madame Gérard, qui réservait spécialement le jeu du chagrin pour madame Baudouin.

Puis la triste madame Gérard et la compatissante madame Baudouin passèrent au moins deux heures à examiner les ourlets de ceci, le tissu de cela, les qualités et les façons.

Aristide était allé à la messe à Villevieille, espérant y rencontrer madame Vieuxnoir.

Sa mère l’avait informé de la guérison d’Émile et lui avait demandé : « Où est donc cet idiot avec lequel tu passes ton temps ? Il pourrait servir à suivre le jeune homme et à savoir ce qu’il fait.

— Bon ! j’en parlerai à Perrin, » dit Aristide et, en effet, il passa par Bourgthéroin.

« Tiens te voilà ? s’écria Perrin avec joie ; est-ce que tu viens me chercher ?

— Oui, reprit Aristide. Je suis venu pour te donner de l’occupation.

— À quoi ?

— Mais il faut y mettre de la malice, et tu n’en as guère.

— Oh ! dit Perrin, je le sais bien !

— Voilà : tu sais ce que c’est qu’un renard… dit Aristide, enchanté de ses farces.

— Tiens, parbleu !

— Eh bien ! il faut que tu te fasses renard !