Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/365

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— Oh : répondit le secrétaire, vous savez, Madame, un séjour de plusieurs heures dans l’eau déforme beaucoup ! »

Madame Germain pleura encore à l’idée qu’elle ne reverrait pas le visage de son enfant, mais quelque chose d’informe !

« Il faut pendre un peu sur vous, reprit le secrétaire, vous avez besoin de vos forces ; c’est un grand malheur, il faut s’en rapporter à Dieu. Ne restez pas seule ; quoique je sois un peu pressé, je puis prévenir quelques personnes pour vous tenir compagnie. Ayez du courage !…

— Oh ! merci, Monsieur ! dit-elle, vous êtes trop bon. Il ne me faut personne que mon fils. Envoyez-le-moi. » Madame Germain avait l’air d’un enfant qui prie.

« Ce ne serait peut-être pas prudent, dit-il ; l’esprit se frappe ; attendez à demain, passez la nuit avec…

— Oh ! je veux le voir, je veux le voir ! s’écria-t-elle d’un accent absolu.

— Eh bien ! qui voulez-vous que je vous envoie parmi vos amis…

— Personne, personne ! mon fils !… je le veux ! »

Madame Germain regarda le secrétaire comme pour lui demander secours, avec des yeux suppliants ; mais à travers sa douleur elle vit vaguement qu’il paraissait embarrassé. Elle revint un peu à elle, et songea qu’il fallait veiller à bien des devoirs. Elle soupira fortement.

« Il est bien difficile d’avoir du courage reprit-elle. Et j’ai à vous remercier de votre obligeance.

— Mais non, dit le secrétaire, c’est si naturel !

— Vous avez été d’une bonté extrême… il est si ennuyeux de voir pleurer !

— Si je puis vous être utile… reprit-il pour écarter ce point de la conversation.

— Oh ! merci ! Je vais aller chercher des amis. Mais envoyez-moi mon enfant ce soir, je vous en supplie… tout de suite.

— Je vous le promets… Calmez-vous, pauvre Madame, je ne vous quitte que si vous vous sentez en état d’être seule… Ne vous frappez pas l’imagination… pleurez le moins possi-