connaissant comme un chien, et subissait les coups et les farces sans en chercher la raison, attribuant ses mésaventures au hasard, et les oubliant dès le lendemain ; très heureux de cette tutelle de tous les instants qu’Aristide exerçait sur lui, car le jeune Gérard ne voulait pas s’en séparer et le traînait partout.
À ce moment, il y avait à Villevieille un cirque établi pour quelques jours ; Aristide et Perrin y étaient continuellement fourrés, et le premier se mit en tête de faire apprendre à son esclave le saut périlleux, tel que le pratiquait Antonio, le clown de la troupe.
« Tu vois, lui disait-il, comme on applaudit Antonio ; est-ce que tu ne serais pas content qu’on t’applaudît comme lui ? Il faut étudier le tour : ce n’est pas difficile.
— Oh ! dit Perrin, on n’apprend ça qu’étant enfant.
— Bah ! dit Aristide, Antonio n’est plus enfant, et il va très bien tout de même. Vois-tu, on décompose le travail ; on commence par le simple et on finit par le composé.
— Oui, dit Perrin qui voulait toujours avoir l’air de comprendre.
— On commence par la culbute simple, reprit Aristide ; tu sais bien faire la culbute ?
— Pardieu ! s’écria Perrin en posant ses mains sur le gazon.
— Va ! »
Perrin fit sa culbute, mais sans grâce ; et comme il y a des êtres voués à un perpétuel malheur, ses reins frottèrent sur un caillou.
« Tu es un cul-de-plomb, dit Aristide ; regarde donc Antonio, comme il est vif !
— Comme une anguille ! répondit Perrin ; et, entraîné par l’ambition d’acquérir plusieurs talents, il ajouta : Je voudrais bien savoir faire la roue.
— Bon, dit Aristide, quand tu sauras faire le saut périlleux, tu apprendras facilement la roue.
— Ce serait tout de même fameux ! s’écria Perrin exalté : tout le monde me regarderait !
— Après la culbute simple en mettant les deux mains, re-