Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/151

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une famille. J’ai donc perdu toute mon existence puisque mes exemples et mes leçons ont eu si peu d’influence sur vous ? J’ai eu beaucoup d’amis. Mais ai-je jamais voulu autre chose que les plus hautes jouissances intellectuelles ? Si les femmes ne jouent pas un rôle moralisateur dans la société, elles méritent qu’on en fasse ce qu’en font les sauvages des bêtes de somme. Vous trouvez donc que notre sexe n’est pas assez calomnié ? De mon temps, les femmes cachaient leurs sottises ; aujourd’hui elles les étalent. Au lieu de penser, de travailler, d’élargir votre cervelle, vous ne savez plus maintenant que vous avilir. Et si vous saviez quelle opinion ont de vous ces hommes dont vous vous figurez faire le bonheur !

Françoise était restée presque aussi timide et soumise devant sa mère que lorsqu’elle était jeune fille.

— Ah ! dit-elle avec assez peu d’assurance, je suis bien tourmentée et je n’aurais pas osé vous parler.

— Je le pense bien, et je ne suis pas ici pour écouter les niaiseries sentimentales avec lesquelles vous prétendriez probablement expliquer vos étranges divertissements. Je suis venue vous dire que je ne veux point que mes dernières années soient attristées, et que puisque, malheureusement, je n’ai pu vous empêcher de le faire, je ne veux plus vous voir ni entendre parler de vous. Au moins l’on verra que je ne tolère pas votre conduite et que je m’y oppose dans la mesure de mes moyens.

Françoise était interdite.

— Oh ! s’écria-t-elle, je me crée moi-même tant de