heureuse des femmes. Le jour où je n’aurais plus ce bouclier contre M. du Quesnoy, je serais écrasée.
— Mais ne t’exagères-tu pas tes griefs contre Joachim ?… N’est-il pas à peu près comme tout le monde ?
— Non, non, dit Françoise, j’ai presque honte d’être sa femme…
— Mais il n’a rien fait…
— Ses pensées, ses désirs, ses opinions, ses sentiments, tout me révolte et m’effraye en lui, m’effraye par les conséquences à venir.
— J’ai souvent pensé, dit Mlle Guay, à sermonner ce charmant affreux homme, car je le trouve charmant au dehors, et c’est bien dommage que l’intérieur soit si vilain.
— Tu me rendrais un mauvais service. N’y songe pas. Ma mère a refusé de m’écouter à son sujet. Elle m’a accusée de fausse sentimentalité, de désœuvrement et de poésie. Jamais je ne lui en reparlerai. Cependant je voudrais qu’elle ne se laissât pas abuser par lui. Il faut absolument que j’inspire de la crainte à cet homme, c’est le seul moyen de le retenir.
— N’aimerais-tu pas beaucoup la domination, sans le savoir ? demanda Charlotte.
Françoise ne répondit pas à la question.
— S’il faut lutter, je lutterai avec acharnement. Je ne tiens à lui demander ni égards, ni amitié, ni estime. Il y a longtemps que j’en ai fait bon marché, mais il faut qu’il me craigne comme un juge.
— Il te détestera de même.