Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
58
ÉDOUARD.

par ce qui est bon, c’est par ce qui est juste, vrai, élevé dans la vie, que nous nous sommes entendus. Nous avons senti que nous parlions le même langage, et nous nous sommes aimés. Ne démentons pas à présent ces qualités de l’âme auxquelles nous devons notre amour, et sachons être heureux dans l’innocence, et nous contenter du bonheur dont nous pouvons jouir devant Dieu. Il le faut, Édouard, oui, il faut nous unir, ou nous séparer. Nous séparer ! Crois-tu que je pourrais écrire ce mot, si je ne savais bien que l’effet en est impossible ? Où trouverais-tu de la force pour me fuir ? On en trouverais-je pour vivre sans toi ? Toi, moitié de moi-même, sans lequel je ne puis seulement supporter la vie un seul jour, ne sens-tu pas comme moi que nous sommes inséparables ? Que peux-tu m’opposer ? Un fantôme d’honneur qui ne reposerait sur rien. Le monde t’accuserait de m’avoir séduite ! Eh ! quelle séduction y a-t-il pour deux êtres qui s’aiment que la séduction de l’amour ? N’est-ce pas moi d’ailleurs qui t’ai séduit ! Si je ne t’avais montré que je t’aimais, m’aurais-tu avoué ta tendresse ? Hélas ! tu mourais plutôt que de m’en faire l’aveu ! Tu dis que tu ne veux pas m’abaisser ? Mais pour une femme y a-t-il une autre gloire que d’être aimée ? Un autre rang que d’être aimée ? Un autre titre que d’être aimée ! Te défies-tu assez de ton cœur pour croire qu’il ne me