Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/147

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et se paralysent par suite de cette dispersion.

Et c’est trop souvent ce spectacle que nous donne l’enseignement de nos lycées. Chacun y professe sa spécialité comme si elle était une fin en soi, alors qu’elle n’est qu’un moyen en vue d’une fin à laquelle elle devrait être, à tout moment, rapportée. Au temps où j’enseignais dans les lycées, un ministre, pour lutter contre ce morcellement anarchique, institua des assemblées mensuelles où tous les professeurs d’un même établissement devaient venir s’entretenir des questions qui leur sont communes. Hélas ! ces assemblées ne furent jamais que de vaines formalités. Nous nous y rendions avec déférence, mais nous pûmes constater bien vite que nous n’avions rien à nous dire, parce que tout objectif commun nous faisait défaut. Comment en serait-il autrement tant que, à l’Université, chaque groupe d’étudiants reçoit son enseignement préféré dans une sorte de compartiment étanche ? Le seul moyen de prévenir cet état de division, c’est d’amener tous ces collaborateurs de demain à se réunir et à penser en commun à leur tâche commune. Il faut qu’à un moment donné de leur préparation, ils soient mis à même d’embrasser du regard, dans toute son étendue, le système scolaire à la vie duquel ils seront appelés à participer ; il faut qu’ils voient ce qui en fait l’unité, c’est-à-dire quel idéal il a pour fonction de réaliser, et comment toutes les parties qui le composent doivent concourir à ce but final. Or, cette initiation ne peut se faire qu’au