Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/43

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harmonique est, en effet, nécessaire et désirable, il n’est pas intégralement réalisable ; car il se trouve en contradiction avec une autre règle de la conduite humaine qui n’est pas moins impérieuse : c’est celle qui nous ordonne de nous consacrer à une tâche spéciale et restreinte. Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas nous vouer tous au même genre de vie ; nous avons, suivant nos aptitudes, des fonctions différentes à remplir, et il faut nous mettre en harmonie avec celle qui nous incombe. Nous ne sommes pas tous faits pour réfléchir ; il faut des hommes de sensation et d’action. Inversement, il en faut qui aient pour tâche de penser. Or, la pensée ne peut se développer qu’en se détachant du mouvement, qu’en se repliant sur elle-même, qu’en détournant de l’action extérieure le sujet qui s’y donne tout entier. De là une première différenciation qui ne va pas sans une rupture d’équilibre. Et l’action, de son côté, comme la pensée, est susceptible de prendre une multitude de formes différentes et spéciales. Sans doute, cette spécialisation n’exclut pas un certain fond commun, et, par suite, un certain balancement des fonctions tant organiques que psychiques, sans lequel la santé de l’individu serait compromise, en même temps que la cohésion sociale. Il n’en reste pas moins qu’une harmonie parfaite ne peut être présentée comme la fin dernière de la conduite et de l’éducation.

Moins satisfaisante encore est la définition utilitaire d’après laquelle l’éducation aurait pour objet