Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/67

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ment monopoliser l’enseignement. La question est trop complexe pour qu’il soit possible de la traiter ainsi en passant : nous entendons la réserver. On peut croire que les progrès scolaires sont plus faciles et plus prompts là où une certaine marge est laissée aux initiatives individuelles ; car l’individu est plus volontiers novateur que l’État. Mais de ce que l’État doive, dans l’intérêt public, laisser s’ouvrir d’autres écoles que celles dont il a plus directement la responsabilité, il ne suit pas qu’il doive rester étranger à ce qui s’y passe. Au contraire, l’éducation qui s’y donne doit y rester soumise à son contrôle. Il n’est même pas admissible que la fonction d’éducateur puisse être remplie par quelqu’un qui ne présente pas des garanties spéciales dont l’État seul peut être juge. Sans doute, les limites dans lesquelles doit se renfermer son intervention peuvent être assez malaisées à déterminer une fois pour toutes, mais le principe de l’intervention ne saurait être contesté. Il n’y a pas d’école qui puisse réclamer le droit de donner, en toute liberté, une éducation antisociale.

Il est toutefois nécessaire de reconnaître que l’état de division où sont actuellement les esprits, dans notre pays, rend ce devoir de l’État particulièrement délicat, en même temps, d’ailleurs, que plus important. Il n’appartient pas, en effet, à l’État de créer cette communauté d’idées et de sentiments sans laquelle il n’y a pas de société ; elle doit se constituer d’elle-même, et il ne peut que la consacrer, la maintenir, la rendre plus consciente aux particuliers.