Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/85

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

règnent dans le milieu social où nous vivons. L’opinion nous les impose, et l’opinion est une force morale dont le pouvoir contraignant n’est pas moindre que celui des forces physiques. Des usages auxquels elle prête son autorité sont par cela même soustraits, dans une large mesure, à l’action des individus. Nous pouvons bien y contrevenir, mais alors les forces morales contre lesquelles nous nous insurgeons ainsi réagissent contre nous, et il est difficile que, en raison de leur supériorité, nous ne soyons pas vaincus. C’est ainsi que nous pouvons bien nous révolter contre les forces matérielles dont nous dépendons ; nous pouvons tenter de vivre autrement que ne l’implique la nature de notre milieu physique ; mais, alors, la mort ou la maladie sont la sanction de notre révolte. De même, nous sommes plongés dans une atmosphère d’idées et de sentiments collectifs que nous ne pouvons pas modifier à volonté ; et c’est sur des idées et des sentiments de ce genre que reposent les pratiques éducatives. Elles sont donc des choses distinctes de nous, puisqu’elles nous résistent, des réalités qui ont par elles-mêmes une nature définie, acquise, qui s’impose à nous ; par conséquent, il peut y avoir lieu de l’observer, de chercher à la connaître dans le seul but de la connaître. D’autre part, toutes les pratiques éducatives, quelles qu’elles puissent être, quelque différence qu’il y ait entre elles, ont en commun un caractère essentiel : elles résultent toutes de l’action exercée par une génération sur