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vements, mais sont toutes proches du mouvement, qu’elles ont pour fonction d’orienter. Si ce ne sont pas des actions, ce sont, du moins, des programmes d’action, et, par là, elles se rapprochent de l’art. Telles sont les théories médicales, politiques, stratégiques, etc. Pour exprimer le caractère mixte de ces sortes de spéculations, nous proposons de les appeler des théories pratiques. La pédagogie est une théorie pratique de ce genre. Elle n’étudie pas scientifiquement les systèmes d’éducation, mais elle y réfléchit en vue de fournir à l’activité de l’éducateur des idées qui le dirigent.

III. Mais la pédagogie ainsi entendue est exposée à une objection dont on ne peut se dissimuler la gravité. Sans doute, dit-on, une théorie pratique est possible et légitime quand elle peut s’appuyer sur une science constituée et incontestée dont elle n’est que l’application. Dans ce cas, en effet, les notions théoriques d’où sont déduites les conséquences pratiques ont une valeur scientifique qui se communique aux conclusions qu’on en tire. C’est ainsi que la chimie appliquée est une théorie pratique qui n’est que la mise en œuvre des théories de la chimie pure. Mais une théorie pratique ne vaut que ce que valent les sciences auxquelles elle emprunte ses notions fondamentales. Or, sur quelles sciences la pédagogie peut-elle s’appuyer ? Il devrait d’abord y avoir la science de l’éducation. Car, pour savoir ce que l’éducation doit être, il faudrait avant tout savoir quelle en est la nature, quelles sont les con-