que tout le monde s’entend quand on parle de l’art du soldat, de l’art de l’avocat, de l’art de l’instituteur. Un art est un système de manières de faire qui sont ajustées à des fins spéciales et qui sont le produit soit d’une expérience traditionnelle communiquée par l’éducation, soit de l’expérience personnelle de l’individu. On ne peut les acquérir qu’en se mettant en rapport avec les choses sur lesquelles doit s’exercer l’action et en agissant soi-même. Sans doute, il peut se faire que l’art soit éclairé par la réflexion, mais la réflexion n’en est pas un élément essentiel, puisqu’il peut exister sans elle. Même, il n’existe pas un seul art où tout soit réfléchi.
Mais entre l’art ainsi défini et la science proprement dite, il y a place pour une attitude mentale intermédiaire. Au lieu d’agir sur les choses ou sur les êtres suivant des modes déterminés, on réfléchit sur les procédés d’action qui sont ainsi employés, en vue non de les connaître et de les expliquer, mais d’apprécier ce qu’ils valent, s’ils sont ce qu’ils doivent être, s’il n’est pas utile de les modifier et de quelle manière, voire même de les remplacer totalement par des procédés nouveaux. Ces réflexions prennent la forme de théories ; ce sont des combinaisons d’idées, non des combinaisons d’actes, et, par là, elles se rapprochent de la science. Mais les idées qui sont ainsi combinées ont pour objet, non d’exprimer la nature des choses données, mais de diriger l’action. Elles ne sont pas des mou-