Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/197

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trouvons aucune institution juridique qui rappelle la γραφὴ ἀσεϐείας.

Non seulement les crimes contre la religion sont plus nettement déterminés et sont moins nombreux, mais beaucoup d’entre eux ont baissé d’un ou de plusieurs degrés. Les Romains, en effet, ne les mettaient pas tous sur le même pied, mais distinguaient les scelera expiabilia des scelera inexpiabilia. Les premiers ne nécessitaient qu’une expiation qui consistait dans un sacrifice offert aux dieux[1]. Sans doute, ce sacrifice était une peine en ce sens que l’État en pouvait exiger l’accomplissement, parce que la tache dont s’était souillé le coupable contaminait la société et risquait d’attirer sur elle la colère des dieux. Cependant, c’est une peine d’un tout autre caractère que la mort, la confiscation, l’exil, etc. Or, ces fautes si aisément rémissibles étaient de celles que le droit athénien réprimait avec la plus grande sévérité. C’étaient en effet :

1o La profanation de tout locus sacer ;

2o La profanation de tout locus religiosus ;

3o Le divorce en cas de mariage per confarreationem ;

4o La vente d’un fils issu d’un tel mariage ;

5o L’exposition d’un mort aux rayons du soleil ;

6o L’accomplissement sans mauvaise intention de l’un quelconque des scelera inexpiabilia.

À Athènes, la profanation des temples, le moindre trouble apporté aux cérémonies religieuses, parfois même la moindre infraction au rituel[2] étaient punis du dernier supplice.

À Rome, il n’y avait de véritables peines que contre les attentats qui étaient à la fois très graves et intentionnels. Les seuls scelera inexpiabilia étaient en effet les suivants :

1o Tout manquement intentionnel au devoir des fonctionnaires de prendre les auspices ou d’accomplir les sacra, ou bien encore leur profanation ;

  1. V. Marquardt, Roemisch Staatsverfassung, 2e éd., t. III, p. 185.
  2. V. des faits à l’appui dans Thonissen. op. cit., p. 187.