Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/81

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type unique et commun dont la variété masculine s’est peu à peu détachée. Des voyageurs nous rapportent d’ailleurs que, dans un certain nombre de tribus de l’Amérique du Sud, l’homme et la femme présentent dans la structure et l’aspect général une ressemblance qui dépasse ce qu’on voit ailleurs[1]. Enfin le Dr Lebon a pu établir directement et avec une précision mathématique cette ressemblance originelle des deux sexes pour l’organe éminent de la vie physique et psychique, le cerveau. En comparant un grand nombre de crânes choisis dans des races et dans des sociétés différentes, il est arrivé à la conclusion suivante : « Le volume du crâne de l’homme et de la femme, même quand on compare des sujets d’âge égal, de taille égale et de poids égal, présente des différences considérables en faveur de l’homme, et cette inégalité va également en s’accroissant avec la civilisation, en sorte qu’au point de vue de la masse du cerveau et par suite de l’intelligence la femme tend à se différencier de plus en plus de l’homme. La différence qui existe par exemple entre la moyenne des crânes des Parisiens contemporains et celle des Parisiennes est presque double de celle observée entre les crânes masculins et féminins de l’ancienne Égypte[2]. » Un anthropologiste allemand, M. Bischoff, est arrivé sur ce point aux mêmes résultats[3].

Ces ressemblances anatomiques sont accompagnées de ressemblances fonctionnelles. Dans ces mêmes sociétés, en effet, les fonctions féminines ne se distinguent pas bien nettement des fonctions masculines ; mais les deux sexes mènent à peu près la même existence. Il y a maintenant encore un très grand nombre de peuples sauvages où la femme se mêle à la vie politique. C’est ce que l’on a observé notamment chez les tribus indiennes de l’Amérique, comme les Iroquois, les Natchez[4], à Hawai où

  1. V. Spencer, Essais scientifiques, tr. fr., p. 300. — Waitz, dans son Anthropologie der Naturvœlker, I, 76, rapporte beaucoup de faits du même genre.
  2. L’homme et les sociétés, II, 154.
  3. Das Gehirngewicht des Menschen. Eine Studie. Bonn, 1880.
  4. Waitz, Anthropologie, III, 101-102.