Page:Durkheim - Le Suicide, Alcan, 1897.djvu/271

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cient est encore plus élevé. Pendant la période 1867-74, un million de sous-officiers donnait une moyenne annuelle de 993 suicides. D’après un recensement fait en 1866, ils avaient un âge moyen d’un peu plus de 31 ans. Nous ignorons, il est vrai, à quel chiffre montaient alors les suicides célibataires de 30 ans ; les tableaux que nous avons dressés se rapportent à une époque beaucoup plus récente (1889-91) et ce sont les seuls qui existent : mais en prenant pour points de repère les chiffres qu’ils nous donnent, l’erreur que nous commettrons ne pourra avoir d’autre effet que d’abaisser le coefficient d’aggravation des sous-officiers au-dessous de ce qu’il était véritablement. En effet, le nombre des suicides ayant presque doublé de l’une de ces périodes à l’autre, le taux des célibataires de l’âge considéré a certainement augmenté. Par conséquent, en comparant les suicides des sous-officiers de 1867-74 à ceux des garçons de 1889-91, nous pourrons bien atténuer, mais non pas empirer la mauvaise influence de la profession militaire. Si donc, malgré cette erreur, nous trouvons néanmoins un coefficient d’aggravation, nous pourrons être assurés non seulement qu’il est réel, mais qu’il est sensiblement plus important qu’il n’apparaîtra d’après le calcul. Or, en 1889-91, un million de célibataires de 31 ans donnait un chiffre de suicides compris entre 394 et 627, soit environ 510. Ce nombre est à 993 comme 100 est à 194 ; ce qui implique un coefficient d’aggravation de 1, 94 que l’on peut presque porter à 4 sans craindre de dépasser la réalité[1]


Enfin, le corps des officiers a donné en moyenne, de 1862 à 1878, 430 suicides par million de sujets. Leur âge moyen, qui n’a pas dû varier beaucoup, était en 1866 de 37 ans 9 mois.

  1. Pendant les années 1867-74 le taux des suicides est d’environ 140 ; en 1889-91, il est de 210 à 220, soit une augmentation de près de 60 %. Si le taux des célibataires a crû dans la même mesure, et il n’y a pas de raison pour qu’il en soit autrement, il n’aurait été pendant la première de ces périodes que de 319, ce qui élèverait à 3, 11 le coefficient d’aggravation des sous-officiers. Si nous ne parlons pas des sous-officiers après 1874, c’est que, à partir de ce moment, il y eut de moins en moins de sous-officiers de carrière.