Page:Durkheim - Le Suicide, Alcan, 1897.djvu/392

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370 LE SUICIDE. I. Aussitôt que les sociétés chrétiennes furent constituées, le suicide y fut formellement proscrit. Dès 432, le concile d’Arles déclara que le suicide était un crime et ne pouvait être l’effet que d’une fureur diabolique. Mais c’est seulement au siècle sui- vant, en S63, au concile de Prague, que cette prescription reçut une sanction pénale. Il y fut décidé que les suicidés ne seraient « honorés d’aucune commémoration dans le saint sacriQce de la messe, et que le chant des psaumes n’accompagnerait pas leur corps au tombeau ». La législation civile s’inspira du droit canon, en ajoutant aux peines religieuses des peines matérielles. Un chapitre des établissements de saint Louis réglemente spé- cialement la matière ; un procès était fait au, cadavre du suicidé [)ar devant les autorités qui eussent été compétentes pour le cas d’homicide d’autrui; les biens du décédé échappaient aux hé- ritiers ordinaires et revenaient au baron. Un grand nombre de coutumes ne se contentaient pas de la confiscation, mais prescri- vaient en outre différents supplices. « A Bordeaux, le cadavre était pendu par les pieds; à Abbeville, on le traînait sur une claie par les rues; à Lille, si c’était un homme, le cadavre, traîné aux fourches, était pendu; si c’était une femme, brûlé W ». La folie n’était même pas toujours considérée comme une excuse. L’or- donnance criminelle, publiée par Louis XIV en 1670, codifia ces usages sans beaucoup les atténuer. L’ne condamnation régulière était prononcée ad perpetnam rei memoriam; le corps, traîné sur une claie, face contre terre, par les rues et les carrefours, était cMisuite pendu ou jelé à la voirie. Les biens étaient confis- qf the pénal hiws, New- York, 1883. — Garrison, Le suicide en droit romain et en droit français ^ Toulouse, 1883. — Wynn Wescott, Suicide, Londres, 1885, p. 43-58. — Geiger, Der Selbsfniord im klassischen Altertum, Augs- bourg, 1888. (1) GaiTÎson, op. cit., p. 77. J