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d’attendre davantage : le 31 juillet, vers le milieu de la journée, la flotte et l’armée tout entières furent mobilisées[1].

L’Autriche accueillit la nouvelle sans aucune objection : c’était juste le moment où, comme nous allons le voir, les relations des deux pays devenaient meilleures et, à partir de là, elles continuèrent à s’améliorer. Mais, à Berlin, la protestation fut véhémente et elle se traduisit immédiatement en actes. Déjà, à 12 heures de l’après-midi, l’Empereur Guillaume avait envoyé au Tzar un télégramme d’un ton très menaçant. Il n’y parlait pas encore de la mobilisation russe, mais se plaignait seulement de mesures militaires qui auraient été prises contre lui à sa frontière orientale. Il annonçait qu’il allait être obligé de prendre « les mêmes précautions défensives », et sans dire encore que la guerre en résulterait nécessairement, il faisait entendre qu’elle était inévitable si la Russie continuait à armer ; il en déclinait la responsabilité par avance et la rejetait tout entière sur l’Empereur Nicolas[2]. L’état de danger de guerre (Kriegsgefahrzustand) était aussitôt décrété ; peut-être même le décret fut-il antérieur au télégramme : cette mesure a pour effet de couper les relations entre l’Allemagne et les autres pays, et permet

  1. Cor. B., no 113, L. J., no 118. — Ce fait capital que la mobilisation générale autrichienne a été antérieure à la mobilisation générale russe n’est, nulle part, signalé dans le Livre Blanc. Cette antériorité est pourtant certaine. Elle est affirmée non seulement par le télégramme explicite de M. Paléologue, mais par le rapport que Sir M. de Bunsen adressa à son Gouvernement après être rentré en Angleterre (Cor. B., no 161). Il y a bien un télégramme du même ambassadeur fixant au 1er août la mobilisation générale de l’armée et de la flotte (Cor. B., no 127. Mais il faut entendre par là que le 1er août fut le premier jour de la mobilisation : la promulgation du décret était de la veille.
    La presse allemande a fait grand état d’une lettre écrite par un agent diplomatique belge, nommé M. de l’Escaille, qui fut interceptée par le cabinet noir allemand. M. de l’Escaille y exprimait des sentiments assez favorables à l’Allemagne, disant qu’elle avait fait le possible pour prévenir la guerre. Un fait montre quel crédit méritent les sources où se renseignait M. de l’Escaille : dans cette lettre, datée du 30 juillet, il est dit que le décret de mobilisation générale a été publié le 30 à 4 heures du matin ; ce qui est certainement inexact. Pourtant la date d’une publication de ce genre est un fait facile à constater.
  2. L. B., Préf., p. 13.