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Page:E. Daudet - Le Comte de Paris, 1883.djvu/16

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une révolution. » L’enfant avait trop souvent entendu parler de révolutions antérieures pour ne pas comprendre la redoutable portée de ce mot. »

Éclairé par ce langage, il assista grave, ému, silencieux, aux péripéties de cette terrible journée. Il entendit gronder autour du palais la foule menaçante ; il assista à l’abdication de son aïeul, cette abdication qui devait lui donner le trône et qui ne fit que précipiter la catastrophe ; à travers les périls de l’émeute, il suivit sa mère au palais Bourbon ; il fut témoin de l’envahissement de la Chambre par la populace armée ; il connut enfin les angoisses d’une fuite émouvante, exposée aux plus redoutables dangers et qui le conduisait vers l’exil, tandis qu’il criait : « Sortir de France ! non, jamais. » Il fallut en sortir cependant ; et, tout enfant qu’il était, il eut le sentiment de son malheur, quand, au moment où on venait de franchir le Rhin, sa mère dit avec des larmes : « C’est maintenant que je me sens véritablement exilée. »

Le malheur mûrit précocement les jeunes cerveaux. Celui-ci ne contribua pas peu à viriliser l’enfant qui en était la victime. Dès