saurait l’entendre sans regretter qu’un homme doué de facultés si éminentes soit perdu pour la politique. Quant à lui, il ne semble pas qu’il ait déploré longtemps les circonstances qui, parmi le personnel nouveau du gouvernement, l’ont condamné à n’être plus rien. Il s’est résigné sans effort à son impuissance, et loin de s’attarder à en gémir, il s’est hâté de reporter sur d’autres études et d’autres sujets l’activité de son esprit. L’histoire avait été son premier aliment ; il est revenu à elle et a entrepris d’importants travaux sur l’histoire de France au xviiie siècle. Ses aïeux ont été mêlés activement aux événements les plus considérables de cette époque. Dans les archives de sa famille, dans celles des affaires étrangères dont, étant ministre, il avait pu apprécier les richesses, il a retrouvé des documents propres à faire la lumière sur ces événements. Il les a réunis, collationnés et interrogés pour avoir la vérité sur des temps non encore éclairés par l’histoire. C’est ainsi que, demandant au passé l’oubli du présent, il a rempli ses loisirs. Pendant tout ce dernier hiver, on a pu le voir dans la salle de travail des Archives des affaires étrangères, consultant les registres des pièces historiques.
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