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Page:E. Feydeau - Souvenirs d’une cocodette, 1878.djvu/172

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SOUVENIRS


tout ce que j’avais laissé faire et fait dans cette abominable nuit.

Il est vrai que au bout de quelques jours, l’absence de douleurs nouvelles et la nécessité aidant, je finis par m’habituer à ma situation de femme. Mon mari se faisait de plus en plus tendre.

Il mettait un peu plus d’intelligence et d’humanité, une sorte de bonté, dans ses transports. Néanmoins, il y avait, dans toute sa manière d’être et dans ses paroles, certaines choses qui me paraissaient de plus en plus singulières. Ce fut lui-même qui se chargea de me les expliquer.

Il avait une qualité qui, en certaines occasions pouvait passer pour un grand défaut ; je veux dire qu’il était extrêmement expansif et communicatif. Il ne lui suffisait jamais de goûter un plaisir. Pour que ce plaisir fût complet, il fallait à toute force qu’il en parlât. Pendant les longues journées qui suivirent notre mariage et que nous passâmes en tête-à-tête, ne sortant que de loin en loin, et toujours ensemble, en voiture fermée, pour aller faire un tour dans les recoins les plus déserts du Bois de Boulogne, il crut devoir me confier, afin de se distraire lui-même, les motifs qui l’avaient déterminé à m’épouser.

— Voyez-vous, me dit-il un jour, il ne faut pas que vous vous imaginiez avoir pour époux un