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SOUVENIRS


effusions de mon père[1], c’est que dès l’âge de seize ans, j’avais le visage plein et d’un bel ovale[2], sans bouffissures ni maigreur.

C’est que mon teint avait l’éclat et la fraîcheur que font si bien valoir les yeux et les cheveux noirs, c’est enfin que mes traits les plus accentués étaient le menton et la bouche. Tout cela me composait une physionomie qui, m’a-t-on dit souvent plus tard, n’était pas sans charme.

Lorsque j’eus atteint[3] seize ans, me sentant déjà femme et toute formée, je montrai quelque velléité d’indépendance. Ma mère qui m’aimait peu, étant jalouse de mes charmes naissants, et elle avait bien tort, car elle était charmante, la pauvre femme ! ma mère, donc, commença à monter contre moi une petite persécution des plus déloyales et des plus sournoises. Comme elle avait naturellement la haute main sur les moindres objets qui concernaient la toilette de ses filles, et comme mes sœurs étaient trop jeunes encore pour qu’elle daignât s’occuper d’elles, elle se plaisait à me faire porter les vêtements qu’elle supposait devoir le plus m’enlaidir, tels que des robes couleur abricot, ou des mantelets de soie verte, ou bien encore de tout petits[4] chapeaux qui contrastaient

  1. Variante, ligne 1, de mon père ; lire : paternelles.
  2. — ligne 2, après ovale ; lire : un peu allongé.
  3. — ligne 10, après atteint ; lire : mes.
  4. — ligne 25, après petits ; lire : tout petits.