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Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur, 1860.djvu/354

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MERLIN L’ENCHANTEUR.

à notre mauvaise fortune de marcher modestement à pied. »

Ayant entendu cette réprimande, Turpin lâcha la bride de l’hippogriffe, et rentra dans le même sentier qui le conduisit à Venise.

VI

Quand pour la première fois Merlin l’enchanteur aborda à Venise la Belle, on ne voyait encore ni tours, ni dômes argentés, ni palais ducal, ni lion à la crinière d’or, rugissant au sein des mers d’azur.

Il y avait cent îlots de sable aride, la demeure des oiseaux de tempêtes ; çà et là, une cabane de chaume, peuplée de pauvres gens ; pas un donjon ; à peine une barque amarrée sur la plage par une corde de chanvre.

Le doge était un batelier. Il vivait sous son toit de pêcheur, avec sa fille Nella, du produit de ses filets, et, je pense aussi, d’un peu de piraterie.

Nella avait dix-sept ans, peut-être moins, mais non pas davantage. Le duvet était encore sur ses joues. Ses yeux brillaient déjà comme l’étoile encore trempée des pleurs de l’Océan.

Une simple batelière ! un enfant ingénu, content de son sort, et qui chantait sur le rivage de joyeuses barcarolles !