Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur, 1860.djvu/373

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
361
LIVRE XI.

« N’êtes-vous pas le serviteur de Merlin ? » il répondit : « Moi, son serviteur ! de qui voulez-vous parler ? Je ne connais pas cet homme. »

Satisfaits de cette réponse, les docteurs le comblèrent de caresses ; elles firent sur lui ce que n’avait pu la terreur. Le second jour, lorsque les juges lui demandèrent s’il n’avait pas été témoin de quelque œuvre infernale, il répondit :

« Je crois bien qu’il y a quelque peu de diablerie dans cet homme, et même une parenté éloignée avec Satan. »

Le troisième jour le même juge qui l’avait interrogé lui dit que l’on aurait besoin de deux fagots de ramée ; il rendrait au tribunal le service signalé d’aller en couper le nécessaire dans le bois d’Égérie :

« Tenez, prenez cette serpe, mon ami, et partez. »

En même temps, il lui indiqua le chemin, si bien qu’il était impossible de se tromper.

Jacques prit la serpe, l’aiguisa et se rendit à l’endroit indiqué ; deux heures après, il reparaissait portant sur son dos deux fagots de myrtes, d’orangers et d’autres bois odoriférants qu’il disposa en un petit bûcher sur la place Saint-Ange. À ce moment même Merlin était tout pensif, accoudé à la fenêtre de sa prison ; il le vit passer courbé sous la charge ; il soupira, mais ne fut point étonné. C’est à cette heure qu’il dit : Sancta simplicitas !

Avant qu’il se fût retourné, un ermite confesseur, la tête encapuchonnée, les reins ceints d’une corde, s’était