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MERLIN L’ENCHANTEUR.

qu’ils ont creusées déjà auraient dû te contenter. »

Sur chaque place, il y avait un bûcher flambant ; et Jacques aussi en avait allumé un plus grand que les autres.

« Pour qui tous ces bûchers, quand un seul doit suffire ?

— Pour toi, Merlin, répondait la foule. Tu as trois vies. Un seul bûcher ne te suffirait pas. »

À cette réponse de la multitude, son père crut que sa dernière heure était venue ; perdu dans le grand nombre, il s’approcha de lui furtivement.

« Je suis encore là, mon fils ! j’ai peur pour toi. Tu n’as plus que ce moment. Partons, enfin.

— Moi, je reste ! Ils me font pitié ! »

II

Cependant les juges, docteurs, sages, les grands de la terre et des îles, tous ceux qui pratiquaient l’ancien art, astrologues de Chaldée, devins de Vortigern, nécromans de Tolède, s’affligeaient de ce que Merlin vécût encore. Craignant que la colère des peuples ne fût chose vaine autant que leur amour, ils s’assemblèrent et firent comparaître Merlin devant eux dans l’enceinte du Colisée. Les peuples s’assirent sur les gradins, les puissants de la terre sur des trônes d’émeraude, tous se réjouissant