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MERLIN L’ENCHANTEUR.

tissent en foule sous la figure de chats-huants et de chauves-souris ; tu les verrais, hébétés par la lumière des vivants, voltiger sur ton front avec des cris sauvages. »

En disant ces mots, il heurta un pan de vieux murs réliculaires dans la villa Adriani. Il en sortit une vieille pie qui alla se poser sur une arche d’aqueduc en criant d’une voix cassée : Ave, Cæsar !

« Vous l’entendez, dit Jacques en prêtant l’oreille. Elle parle latin !

— Il est vrai, reprit Merlin, mais cela ne t’excuse en rien. Un homme de bien peut toujours résister à une pie radoteuse, fût-elle même enchantée, comme celle-ci l’est sans doute ; ne t’ai-je pas enseigné ce qu’il faut faire en des rencontres semblables ?

— J’avais oublié, seigneur Merlin, votre livre de magie à la maison. Ils auront pris occasion de cela pour me jeter un sort.

— Fausses excuses, encore un coup ! Je t’ai appris, non une fois, mais cent fois, que si tu te trouves privé, par aventure, de tous les instruments de notre art, une bonne pensée, un seul battement de cœur te suffit, Jacques. Je te l’ai appris ; tu as tout oublié.

— La faute en est donc au pays, seigneur Merlin ?

— Assurément, il y a ici quelque chose de trop puissant pour ta cervelle que le moindre souffle ébranle en des sens opposés ; et je ne saurais m’étonner que les prestiges employés ici aient à demi renversé ta raison. Mais tu ne pourrais nier que les miens ne soient plus