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MERLIN L’ENCHANTEUR.

beaucoup de dogmes ? Comment parlez-vous à l’imagination du grand nombre ?

— Écoutons, mon cher Merlin, le chant du hibou qui se réveille, répliquait le roi. Ne troublons pas son hymne religieux. C’est, vous le savez, notre oiseau sacré. Je vais lui porter sa pâture. »

Sur cela, cherchant le Vide, il se retirait. Les courtisans rappelaient alors à notre héros qu’il n’est pas permis d’interroger le roi.

« Vous, du moins, leur disait Merlin, quel est votre dogme, votre livre sacré ? En quoi consistent vos cérémonies ?

— Des cérémonies ! répliquaient les courtisans. Nous en avons plus que personne. Tout est chez nous cérémonie, même de balayer la poussière. »

Puis ils se retiraient à leur tour.

Resté seul, Merlin fut abordé par un homme qui, à sa mine, lui sembla un esclave forain des esprits des ruines. Cet homme, voyant que ses maîtres s’étaient éloignés, s’approcha et lui dit à la hâte d’une voix convulsive :

« Ne les écoutez pas, Merlin. Ils vous trompent. Ce sont tous des traîtres, ennemis de la plèbe. Ils prétendent vouloir tout renverser, niveler ras de terre. N’en croyez pas un mot. Si vous les connaissiez mieux, vous verriez qu’ils ont chacun l’indignité de laisser subsister quelque chose, l’un, un demi-fût de colonne pour s’y appuyer en dormant, l’autre, un pan de mur, un troisième, un débris de tombeau ; celui-ci, un peu de po-