avais omis quelqu’une, il serait aisé de te la procurer. Chaque pierre, chaque inscription, chaque colonnette, si tu l’interroges, te dira à toute heure dans cette langue des fleurs et des pierreries que tu connais si bien : « Vois, Viviane, s’il t’est resté fidèle ! »
Peut-être est-ce la première fois que mon art sert à me consoler au lieu de me faire souffrir. Je suis moi-même dupe de ces murailles crénelées que j’élève si aisément à une félicité imaginaire : quand j’entasse pierre sur pierre, il me semble que je donne des fondements solides à mes rêves. Je bâtis sur le granit les songes de mon cœur. Je les crois invulnérables, parce que je les environne d’une aveugle forteresse.
V
Pauvre Merlin, tu me fais pitié avec ton Alhambra. Est-ce avec des murailles peintes, est-ce avec des tours vermeilles que tu prétends m’éblouir ? Ah ! que n’ai-je trouvé dans ta lettre un mot, un seul mot de notre langue d’autrefois ! tu aurais pu te dispenser d’élever jusqu’aux nues tes merveilleux donjons, où je sens l’air me manquer.
Qu’est devenu le temps, Merlin, où tu n’avais que toi-même ? Tes Alhambras, tes tours géantes étaient