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LIVRE XXIV.

les maudits le cherchèrent longtemps ; car ils étaient accoutumés à son autorité, et ils ne croyaient pas pouvoir vivre un moment sans celui qui remplissait de sa pensée le vaste enfer.

« Où est-il ? Quand reviendra-t-il ? » disaient les maudits aux ténèbres.

Et les ténèbres répondaient :

« Nous ne savons où il est.

— Cherchez encore, reprenaient les démons ; vous êtes ses conseillers.

— Nous avons cherché, répliquaient les ténèbres ; nous n’avons pu le retrouver. »

Alors un éclair de joie traversa l’enfer ; car chacun des maudits se prit à espérer qu’il remplacerait le chef des abîmes. Tous regardèrent à la fois d’un œil oblique du côté du trône funèbre ; et, le voyant vide pour la première fois, chacun se promit de s’y asseoir, à la place de celui qui avait disparu.

Aussitôt celui qui était le plus près du trône infernal en monta les degrés et il cria :

« Consolez-vous ! Je remplacerai celui que vous avez perdu, et serai pour vous un véritable père, ce qu’il n’a jamais été. Malgré les apparences, je suis plein de douceur. Obéissez-moi seulement, comme vous lui obéissiez. Tout ira bien. Je suis partisan du progrès. Je ferai des réformes. »

C’est ainsi qu’il parla. Mais sachez qu’il n’y eut pas dans l’abîme une seule puissance, si petite qu’elle fût, qui n’entrât en fureur à ces mots. Le plus petit comme