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MERLIN L’ENCHANTEUR.

qui saura satisfaire à tout ce que vous semblez désirer et même rêver.

Croyez-moi, il n’est rien de plus noble, de plus suave (je me sers de vos propres paroles), qu’un amour de ce genre. Et si, par hasard, cela ne vous suffisait pas, si quelque grande et sublime passion s’éveillait dans votre cœur, je ne vois point du tout pourquoi vous n’épouseriez pas ce Phébus qui, d’ailleurs, ne vous a pas trop menti sur sa généalogie non plus que sur sa lyre ; pourtant, je l’ai obligé de la briser, après l’avoir vaincu publiquement dans le combat du chant. Ce point excepté, il a, ce me semble, tout ce qui est nécessaire à votre bonheur. Il est beau ! dites-vous… Mon Dieu ! je n’en doute pas et je ne prétends pas lutter avec lui à cet égard.

Eh bien, Viviane ! épousez-le. Oui, le mot est prononcé. Sortez des vaines illusions ; voyez-vous, enfin, vous-même telle que vous êtes. Vous pensiez aimer la poésie : il n’en est rien. Ce que vous aimez, c’est le vide. Ce Phébus, déjà sur l’âge, vous convient, vous dis-je. Il ne vous accablera pas des flammes inextinguibles de son cœur. Il vous laissera bercer en paix les oiseaux endormis et vaquer à vos autres occupations. Épousez-le donc si vous n’aimez mieux être nonne et entrer au couvent. Mais je préfère mille fois de vous savoir mariée ; j’en serai moi-même beaucoup plus tranquille.

Dans quel aveuglement ai-je vécu jusqu’ici ! Enfin, mes yeux s’ouvrent ; je me réveille des songes qui m’ont trop occupé. Encore une fois (je ne pourrais trop le re-