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MERLIN L’ENCHANTEUR.

du Lycée par de menus sentiers qu’avaient tracés les faunes.

Un orage les surprit. Ils s’égarèrent. Par bonheur un centaure vint à passer ; et la pluie dégoûtant de sa barbe touffue, il s’arrêta pour l’essuyer ; puis, sans attendre qu’on l’interrogeât, il leur montra le chemin, le bras tendu, avec un hennissement de joie sauvage auquel répondirent les centauresses. Au bruit de ces hennissements arriva Palamède, couronné d’une ronce. Ce roi conduisit les voyageurs dans sa vaste cité de Lycossure.

Il avait encore quelques soubassements de murailles dont il s’excusa. Ce n’était point, disait-il, paresse ni défaut de zèle, s’il n’avait pas mieux nettoyé le sol. Mais le lieu était désert, fort boisé, les matériaux rebelles : « Après tout, de ces immenses murs dont nous parlent les ancêtres, il ne reste guère que les blocs que voici. Ils serviront de siéges à mes hôtes. »

Épistrophius l’embrassa, le consola, le loua même. Il répondit que, bien loin d’avoir aucun reproche à lui adresser, ce qu’il voyait dépassait son espérance. On s’endormit près d’un petit feu de vieilles souches. Cependant les filles du noble Palamède bercèrent leurs enfants qu’elles tenaient sur le foyer, au risque de les noircir de fumée ; et, pour répandre le sommeil, elles chantèrent à demi-voix en alternant des hymnes très-doux, tels que peuvent en imaginer des esprits des ruines. À ces hymnes répondirent les miaulements des chacals, dominés par l’appel solennel du hibou dans les forêts sonores. Jacques trouva en ce lieu-là une sarcelle