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notes sur isabelle eberhardt

il a su que j’étais Russe et musulmane il n’a plus rien compris du tout. Ceux qui ne sont pas dans le Sahara pour leur plaisir ne comprennent pas qu’on y vienne, surtout en dehors de la « saison ». Suivant cette manière de voir, Fromentin n’aurait jamais écrit son « Été dans le Sahara ». Il est vrai que je ne suis pas Fromentin, mais il faut bien commencer. Et puis j’ai le tort de m’habiller comme tout le monde ici[1].

« Le cheikh des Chaouïya de la caravane est un vieillard curieux et qui voudrait s’instruire. Il me demande à 3 heures de lui donner une leçon de français… et nous devons nous séparer au mogh’reb (coucher du soleil).

« Arrivée vers 11 heures et demie à Bir-Djefair, où nous nous reposons dans la cour du bordj infestée de scorpions. Pour commencer mon apprentissage de caravanier, j’ai rempli la guerba (outre) d’une eau de puits excellente, avec ma tasse de fer-blanc.

« Repartis à 2 heures et demie matin, bon train.

« Arrivée à Chegga vers 3 heures trois quarts. Rencontré des « joyeux » venant de Guémar, sans gradés, pour porter plainte au général, à Batna. Bu le café avec eux.

« Repartis le 20, 5 h. 3/4. Arrivée à Bir-Sthil vers 11 heures. Bonne eau. Querelle avec le gardien. Fièvre, soif intense. Pas trouvé à manger (vécu de pain depuis le 18 au soir). Repartis à 9 heures soir.

« Rencontré, au poste télégraphique, à 9 heures, au sud de Sthil, caravanes de Chaamba allant de Barika à Ouargla. Cheikh Abd-el-Kaderben Aly, modèle de la bonne grâce,

  1. Plus tard, quand Isabelle Eberhardt cherchera à connaître les motifs qui pouvaient motiver son expulsion d’Algérie, M. B…, chancelier du Consulat de Russie à Alger, lui écrira, le 18 juin 1901 : « Vous portiez un costume arabe masculin, chose qui, avouez-le vous-même, ne convient pas trop à une demoiselle de nationalité russe.