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Page:Eberhardt - Dans l’ombre chaude de l’Islam, 1921.djvu/339

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notes sur isabelle eberhardt

lettre que publiait la Dépéche Algérienne la date du 4 juin 1901.

— Ayant passé à Eloued, dit-elle, lors d’une premier excursion dans le Sahara constantinois que je fis en été 1899, j’avais gardé le souvenir de ce pays des dunes immaculées, des profonds jardins et des palmeraies ombreuses. Je vins donc me fixer à Eloued, en août 1900, sans savoir au juste pour combien de temps.

C’est là que je me fis initier à la confrérie des Kadriya, dont je fréquentai désormais les trois zaouïya situées aux environs d’Eloued, ayant acquis l’affectionnes trois cheikhs, fils de Sidi Brahim et frères de feu le naïb d’Ouargla.

Le 27 janvier, j’accompagnai l’un d’eux, Si Lachmi, au village de Behima. Le cheikh se rendait à Nefta (Tunisie) avec des khouans, pour une ziara au tombeau de son père Sidi Brahim… Je comptais rentrer le soir même à Eloued, avec mon domestique, un Soufi, qui m’accompagnait à pied. Nous entrâmes dans la maison d’un nommé Si Brahim ben Larbi et, tandis que le marabout se retirait dans une autre pièce pour la prière de l’après-midi, je demeurai dans une grande salle donnant sur une antichambre ouverte sur la place publique où stationnait une foule compacte et où mon serviteur gardait mon cheval. Il y avait là cinq ou six notables arabes de l’endroit et des environs, presque tous khouans Rahmania.

J’étais assise entre deux de ces personnes, le propriétaire de la maison et un jeune commerçant de Guémar, Ahmed ben Belkacem. Ce dernier me pria de lui traduire trois dépêches commerciales, dont l’une, fort mal rédigée, me donna beaucoup de peine. J’avais la tête baissée et le capuchon de mon burnous rabattu par-dessus le turban, ce qui m’empêchait de voir devant moi. Brusquement je reçus à la tête un violent coup suivi de deux autres au bras gauche. Je relevai la tête et je vis devant moi un individu mal vêtu, donc étranger à l’assistance, qui brandissait au-dessus de ma tête une arme que je pris pour une matraque. Je me levai brusquement et m’élançai vers le mur opposé, pour