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ramène vivant, tu auras oublié Emmbarka, la pauvre Emmbarka, qui n’est rien !

Mohammed se pencha vers elle et l'enlaça, essayant tendrement ses larmes.

—— Ne pleure pas, la vie et la mort, et le cœur de l’homme sont entre les mains de Dieu. Quant à moi, je n’ai qu’une parole, et Dieu me maudisse, si j'oublie les serments du jour présent ! Pour toi, j'ai laissé dans l’abandon ma femme, mère de mon fils, et j’ai été sans cesse tracassé par mon père… Reste en paix, Emmbarka, et attends mon retour, en comptant sur Dieu et sur moi !

Comme il allait attendrir, Mohammed se leva et sortit brusquement : il ne convenait pas à un homme, à un djouad (noble), de pleurer devant une femme.

Et Emmbarka demeura seule dans sa misérable chambre, boutique blanchie à la chaux, dans l’une des ruelles boueuses et désertes d’Aflou.

Quelques mois auparavant, comme il elles sait dans la montagne, Mohammed ould Abdel Kader, fils d’une des plus grandes tentes du Diebel Amour, avait rencontré Emarbarka près d’un redir[1] où elle emplissait sa grande amphore de terre cuite. À peine nubile, sous ses haillons de nomade, Emmbarka était déjà belle et Mohammed l’avait convoitée. Elle

  1. Flaque d’eau dans les terres argileuses.