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stein[1]. Goethe a plaisanté sur les Almanachs allemands[2], et sur les autres publications périodiques, toutes pleines de cette sentimentalité ridicule, qui semble à l’ordre du jour. La comtesse observa que les romanciers allemands avaient commencé par gâter le goût de leurs nombreux lecteurs, et que maintenant en revanche les lecteurs perdaient les romanciers, car ceux-ci, pour que leurs manuscrits pussent trouver un éditeur, devaient se conformer au mauvais goût dominant du public.

* Dimanche, 26 avril 1823.

J’ai trouvé Coudray et Meyer chez Goethe. On a causé sur différents sujets : « La bibliothèque grand ducale, a dit entre autres Goethe, possède un globe qui a été construit sous Charles V, par un Espagnol. On trouve dessus quelques curieuses inscriptions, par exemple celle-ci : « Les Chinois sont une nation qui a beaucoup de ressemblance avec les Allemands. » Autrefois, continua-t-il, on avait l’habitude sur les cartes de dessiner dans les déserts d’Afrique des images de bêtes féroces. Aujourd’hui l’habitude est passée ; les géographes aiment mieux nous laisser carte blanche[3], »

* Mercredi, 6 mai 1823.

Le soir, chez Goethe. Il a cherché à me donner une

    qui contient de nombreuses et obscures allusions à la franc-maçonnerie, si répandue et si vivante au dix-huitième siècle.

  1. Mesdemoiselles Caroline et Julie d’Egloffstein étaient deux jeunes dames d’honneur, fort jolies, douées de beaucoup d’esprit et de talents, et pour lesquelles Goethe avait une grande affection.
  2. Analogues à notre ancien Almanach des Muses.
  3. Ces mots sont en français dans le texte. On voit que le grand Goethe, dans l’intimité, ne dédaignait pas le jeu de mots. Il obéit, du reste, à un penchant de son pays ; les Allemands ont le plus grand plaisir à faire des