Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/66

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tant de sollicitude de la part de Goethe m’inspirait de vifs sentiments de reconnaissance, et j’étais heureux de voir qu’il me traitait comme un des siens et qu’il voulait que je fusse considéré comme tel.

Le 21 juin j’avais pris congé de Goethe. Grâce à ses lettres de recommandation, je trouvai à Iéna le meilleur accueil. Je fis sur les quatre volumes d’Art et Antiquité le travail qu’il m’avait demandé, et je le lui envoyai à Marienbad avec une lettre où je lui disais que j’avais l’intention de quitter Iéna et d’aller habiter une grande ville. Iéna me semblait trop monotone. Je reçus aussitôt la réponse suivante :

« La table analytique m’est exactement parvenue ; elle répond tout à fait à mes désirs et remplit mon but. Que je trouve à mon retour les articles de Francfort rédigés de la même façon, et je vous devrai les meilleurs remercîments. Déjà, tout en ne disant rien, je m’occupe à m’acquitter avec vous en réfléchissant ici à vos pensées, à votre situation, à vos désirs, au but que vous cherchez, à vos plans d’avenir. Je serai, à mon retour, prêt à causer à fond avec vous sur ce qui peut vous convenir. Aujourd’hui, je n’ajoute pas un mot. Le départ de Marienbad me préoccupe et m’occupe beaucoup ; il est vraiment bien pénible de rester si peu de temps avec les personnes si remarquables que j’ai trouvées ici.

« Puissé-je vous trouver au sein de votre activité paisible, elle vous mènera un jour par la voie la plus sûre et la plus pure à l’expérience et à la connaissance du monde. Adieu, je pense avec joie à nos relations futures qui seront longues et intimes.

« Goethe. »
« Marienbad, le 14 août 1823.