Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/283

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bienveillant et amical. Tout ce que j’ai entrepris sur son conseil m’a réussi ; aussi, lorsque j’étais embarrassé, j’avais l’habitude de lui demander ce qu’il me fallait faire ; il me le disait instinctivement, et je pouvais être sûr d’une heureuse issue. — Il eût été à souhaiter qu’il pût se mettre en possession de mes idées et de mes grands projets, car lorsque l’esprit démoniaque le quittait, resté avec ses seules facultés humaines, il était embarrassé. Dans Byron aussi le démoniaque a été très-énergique, c’est là ce qui explique ses qualités attractives, auxquelles les femmes surtout ne pouvaient résister. »

— « Dans l’idée de la Divinité, essayai-je de dire, cette force agissante que nous appelons le démoniaque ne semble pas exister. »

— « Cher enfant, dit Goethe, que savons-nous de l’idée de la Divinité, et que signifient nos étroites conceptions de l’Être suprême ? Quand je le nommerais par cent noms, comme les Turcs, cela ne suffirait pas encore, et en face de ses attributs sans limites, je n’aurais rien dit. »

Mercredi, 9 mars 1831.

Goethe a continué aujourd’hui à parler avec le plus grand éloge de Walter Scott.

— « On lit beaucoup trop de livres médiocres avec lesquels on perd son temps et dont on ne retire rien, a-t-il dit. On devrait ne lire que ce qu’on admire, comme je faisais dans ma jeunesse, et comme je le vois maintenant avec Walter Scott. J’ai commencé Rob Roy, et je veux lire de suite ses meilleurs romans. Sujet, idées, caractères, développement, tout y est grand ; et dans les études préparatoires, quelle application ! Dans l’exécu-