Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/353

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montre qu’il y en a de si petites, de si faibles, qu’elles ne sont propres qu’à une existence et à un service subordonnés. D’autres, au contraire, sont très-puissantes et très-énergiques. Celles-ci attirent de force dans leur cercle tous les éléments inférieurs qui les approchent, et les font devenir ainsi partie intégrante de ce qu’elles doivent animer, soit d’un corps humain, soit d’une plante, soit d’un animal, soit d’une organisation plus haute, par exemple, d’une étoile. Elles exercent cette puissance attractive jusqu’au jour où apparaît formé tout entier le monde, petit ou grand, dont elles portaient au fond d’elles-mêmes la pensée. Il n’y a que ces monades attractives qui méritent vraiment le nom d’âmes. Il y a donc des monades de mondes, des âmes de mondes, comme des monades, des âmes de fourmis. Ces âmes si différentes sont, dans leur origine première, des essences sinon identiques, du moins parentes par leur nature. Chaque soleil, chaque planète, porte en soi-même une haute idée, une haute destinée, qui rend son développement aussi régulier et soumis à la même loi que le développement d’un rosier, qui doit être tour à tour feuille, tige et corolle. Vous pouvez nommer cette puissance une idée, une monade, comme vous voudrez, cela m’est indifférent, pourvu que vous compreniez bien que cette idée, cette intention intérieure est invisible, et antérieure au développement qui apparaît dans la nature et qui émane d’elle. — Il ne faut pas nous laisser induire en erreur par les larves, formes transitoires que prend la monade dans le cours de son développement. Nous retrouvons toujours là cette métamorphose, cette puissance de transformation qui réside dans la nature, qui fait d’une feuille une fleur, une rose, d’un œuf une che-