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poésie eût tous les mérites du genre, il n’avait pas dû laisser de côté tous les égards que l’on doit à une société cultivée. — Il est bien remarquable qu’un peuple à moitié sauvage se place à côté du peuple le plus civilisé, dans ce genre de poésie lyrique légère ; ce fait nous prouve encore une fois qu’il y a une poésie universelle répandue partout et qui naît et se déploie différemment suivant les circonstances ; elle n’a nullement besoin que les idées ou les formes lui soient transmises par une tradition ; partout où le soleil brille, son apparition et son développement sont certains.

Les poésies vraiment populaires ne parcourent qu’un cercle assez étroit ; entre chaque nation, il y a des nuances curieuses à étudier, mais, cependant, considérées dans leur ensemble, elles expriment toutes un certain nombre de situations qui reviennent toujours les mêmes ; aussi leur défaut est la monotonie.




LITTÉRATURE GRECQUE ANCIENNE

PLATON CONSIDÉRÉ COMME AYANT CONNU UNE RÉVÉLATION CHRÉTIENNE.
(Morceau écrit en 1796 à propos d’une traduction nouvelle.)

Les hommes ne croiraient jamais avoir assez reçu de l’éternel auteur des choses, s’ils étaient forcés de reconnaître que tous leurs frères ont été de sa part l’objet de soins absolument identiques ; il faut qu’un livre spécial, un prophète spécial leur aient indiqué mieux qu’à personne le chemin de la vie, et avec ce secours, tous doivent faire leur salut, qu’ils seront seuls à faire. Aussi, de tout temps, combien étaient étonnés ceux qui s’étaient attachés à une doctrine exclusive, lorsqu’ils trouvaient en dehors de leur horizon des hommes intelligents et bons qui avaient comme eux à cœur de donner à leur nature morale le développement le plus parfait possible ! Que leur restait-il à faire, sinon à accorder que ces hommes avaient reçu une révélation qui, jusqu’à un certain point, était leur bien propre ? Cette opinion sera toujours celle des esprits qui aiment à s’attribuer des privilèges, et qui, ne voulant pas que Dieu exerce une action ininterrompue sur l’ensemble de son immense univers, regardent comme tout naturel qu’il ait en fa-