Page:Edgeworth - Contes de l enfance.djvu/293

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trait indifférente à celle des étrangers. Elle avait treize ans. À cet âge, les jeunes filles qui manquent d’une bonne éducation se laissent facilement entraîner. La vanité est accessible aux moindres éloges, et le désir de plaire étouffe le germe des meilleures qualités.

Sophie, dont le goût et le jugement avaient été cultivés, ne pouvait tomber dans ces écarts et se laisser prendre à de tels pièges. Elle savait que pour plaire, il ne faut pas chercher à se montrer autre qu’on est. Ses amis l’écoutaient avec plaisir parce qu’elle ne faisait pas parade de ces beaux sentiments que l’on exprime avec recherche et affectation dans le monde fashionable. Mlle Thérèse savait combien ce mot a d’empire, même à treize ans ; mais elle s’assura bientôt qu’il n’avait aucune influence sur Sophie. Mme Montagne avait dit à sa fille que la simplicité et le naturel l’emportent toujours aux yeux des personnes sensées sur les grâces apprises et les façons dictées par la mode.

La petite Marianne, à force d’entendre Mlle Thérèse répéter qu’elle était charmante, commençait à le croire. Elle avait été jusque-là exempte de toute affectation ; mais peu à peu elle s’imagina qu’elle ne pouvait plus dire un mot, faire un geste, lancer un regard, sans être l’objet de l’attention de tout le monde. Mlle Thérèse ne tarda