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Page:Edit concernant les Esclaves des Colonies de 1685 & 1716.djvu/9

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ORDONNANCE DE LA MARINE

permiſſion au Greffe de la Juridiction du lieu de leur réſidence avant leur départ, & en celui de l’Amirauté du lieu du débarquement, dans huitaine après leur arrivée en France.

IV. Lorſque les maîtres deſdits eſclaves voudront les envoyer en France, ceux qui ſeront chargés de leur conduite obſerveront ce qui eſt ordonné à l’égard des maîtres, & le nom de ceux qui en ſeront ainſi chargés ſera inſéré dans la permiſſion des Gouverneurs Généraux ou Commandans & dans les déclarations & enregiſtrement aux Greffes ci-deſſus ordonnés.

V. Les eſclaves negres de l’un & de l’autre ſexe qui ſeront conduits en France par leurs maîtres ou qui y ſeront par eux envoyés, ne pourront prétendre avoir acquis leur liberté ſous prétexte de leur arrivée dans le Royaume, & ſeront tenus de retourner dans nos colonies quand leurs maîtres le jugeront à propos ; mais faute par les maîtres des eſclaves d’obſerver les formalités preſcrites par les précédens articles, les nègres ſeront libres & ne pourront être réclamés.

VI. Faiſons défenſes à toutes perſonnes d’enlever ni ſouſtraire en France les eſclaves negres de la puiſſance de leurs maîtres, ſous peine de répondre de la valeur deſdits eſclaves par rapport à leur âge, à leur force & à leur induſtrie, ſuivant la liquidation qui en ſera faite par les Officiers de l'Amirauté, auxquels nous en avons attribué & attribuons la connoiſſance en première inſtance, & en cas d’appel à nos Cours de Parlement & Conſseils Supérieurs : Voulons en outre que les contrevenants ſoient condamnés pour chaque contravention en 1 000 livres d’amende, applicable un tiers à Nous, un tiers à l’Amiral, & l’autre aux maîtres deſdits eſclaves lorſquelle ſera prononcée par les Officiers des Sieges généraux des Tables de Marbre, ou moitié à l'Amiral, & l’autre moitié aux maîtres deſdits eſclaves lorſque l’amende ſera prononcée par les Officiers des Sieges particuliers de l'Amirauté, ſans que leſdites amendes puiſſent être modérées ſous quelque prétexte que ce puiſſent être.

VII. Les eſclaves nègres de l’un & de l’autre ſexe qui auront été amenés ou envoyés en France par leurs maîtres, ne pourront s’y marier ſans le conſentement de leurs maîtres ; & en cas qu’ils y conſentent, leſdits eſclaves ſeront & demeureront libres en vertu dudit confentement.

VIII. Voulons que pendant le ſéjour des enclaves en France tout ce qu’ils pourront acquérir par leur industrie, ou par leur profeſſion, en attendant qu’ils ſoient renvoyés dans nos colonies, appartienne à leurs maîtres, qui ſeront tenus de les nourrir & entretenir.

IX. Si aucun des maîtres qui auront amené ou envoyé des eſclaves negres en France, vient à mourir, leſdits eſclaves reſteront ſous la puiſſance des héritiers du maître décédé, leſquels ſeront obligés de renvoyer leſdits eſclaves dans nos colonies pour y être partagés avec les autres biens de la ſucceſſion conformément à l’Edit du mois de Mars 1685, à moins que le maître décédé ne leur eût accordé la liberté par teſtament ou autrement, auquel cas leſdits efclaves ſeront libres.

X. Les efclaves negres venant à mourir en France, leur pécul ſi aucun ſe trouve, appartiendra aux maîtres defdits efçlaves.

XI. Les maîtres defdits efclaves ne pourront les vendre ni échanger en France, & feront obligés de les renvoyer dans nos colonies pour y être négociés & employés ſuivant l’Edit du mois de Mars 1685.

XII. Les eſclaves negres étant ſous la puiſſance de leurs maîtres en France, ne pourront eſter en jugement en matière civile, autrement que ſous l’autorité de leurs maîtres.

XIII. Faiſons défenſes aux créanciers des maîtres des eſclaves nègres de faire ſaiſir leſdîts eſclaves en France pour le payement de leur dû, ſauf auxdits créanciers à les faire ſaiſir dans nos colonies dans la forme preſcrite par l’Edit du mois de Mars 1685.

XIV. En cas que quelques eſclaves nègres quittent nos colonies ſans la permiſſion de leurs maîtres & qu’ils ſe retirent en France, ils ne pourront prétendre avoir acquis leur liberté, permettons aux maîtres deſdits eſclaves de les réclamer par-tout où ils pourront s’être retirés, & de les renvoyer dans nos colonies. Enjoignons à cet effet aux Officiers des Amirautés, aux Comiſſaires de marine & à tous autres Officiers qu’il appartiendra de donner main-forte auxdits maîtres & propriétaires pour faire arrêter leſdits eſclaves.

XV. Les habitants de nos colonies qui après être venus en France, voudront s’y établir & vendre les habitations qu’ils poſſedent dans leſdites colonies, ſeront tenus dans un an, à compter du jour qu’ils les auront vendus f & auront ce ceſſé d’être colons, de renvoyer dans nos colonies les eſclaves nègres de l’un & de l’autre ſexe qu’ils auront amenés ou envoyés dans notre Royaume. Les Officiers qui ne ſeront plus employés dans les Etats de nos colonies ſeront pareillement obligés dans un an à compter du jour qu’ils auront ceſſé d’être employés dans leſdits Etats, de renvoyer dans les colonies les eſclaves qu’ils auront amenés ou envoyés en France ; & faute par leſdits habitans & officiers de les renvoyer dans les termes, leſdits eſclaves ſeront libres.

Si donnons en mandement à nos amés & féaux Conſeillers les Gens tenans notre Conſeil Supérieur au Cap, côte Saint-Domingue, que notre préſent Edit ils ayent à faire lire, publier & enregiſtrer, & le contenu en icelui garder, obſerver & exécuter ſelon ſa forme & teneur, nonobſtant tous Edits, Ordonnances, Déclarations, Arrêts & Réglemens & uſages à ce contraires, auxquels nous avons dérogé & dérogeons par le préſent Edit : Car tel eſt notre plaiſir ; & afin que ce ſoit choſe ferme & fiable à toujours, nous y avons fait mettre notre ſcel. Donné a Paris au mois d’Octobre l'an de grâce mil ſepr cent ſeize, & de notre Régné le ſecond, Signé Louis, Et plus par le Roi le Duc Régent préſent, Phélypeaux, & à côté viſa voisin.