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s’exhibaient d’un air avantageux, et même conquérant. Des sourires, qui n’étaient point railleurs, les saluèrent au passage du seuil, et même quelques applaudissements osèrent se produire, quand parut derrière eux le professeur Auguérand, témoin de la mariée. Est-ce que, d’aventure, ce couple-là serait son œuvre et sortirait de ses cornues ? Sérieuse réclame, alors, pour l’élixir de vie !… »

Une dernière phrase, que nous demandons la permission de ne pas reproduire, s’amusait ici à jouer sur les mots et à risquer un badinage que la presse et le public de 1940 ne trouvaient point inadmissible.

Il n’en fallut pas davantage. Dès le matin du 15 juillet, les reporters accouraient à la villa Auguérand et sollicitaient l’interview du professeur ou des conjoints. Le portier chinois les accueillit avec des paroles qui ressemblaient à une chanson d’oiseau, mais qui, si musicales et si peu intelligibles qu’elles fussent, suffisaient cependant à barrer le passage. Messieurs les journalistes insistèrent en vain : force leur fut de s’en tenir à dépeindre vaguement les dépendances du logis, et le vague même de leurs descriptions prêtait à la demeure un regain de mystère. Tout l’après-midi les aéroplanes évoluèrent au-dessus du parc, essayant de surprendre quelque détail scientifique ou intime : le docteur était redevenu énigmatique, et son affaire intéressante, au moins pour deux ou trois journées. On en redemandait ; mais il resta inaccessible. Les reporters du soir n’entendirent, comme ceux du matin, qu’un pépiement de passereau sur des lèvres chinoises. Faute de mieux, ils inventèrent ; un d’entre eux passa la mesure : il prétendait avoir observé les mariés, de nuit, passant en avion devant leur fenêtre entr’ouverte, et il fournit sur eux des renseignements exagérés ; un de ses confrères riposta par des affirmations diamétralement contraires, et encore plus sensationnelles. Polémique. Alors, on voulut savoir, à tout prix : l’oreille publique exigeait la vérité. Elle l’eut.

Elle l’eut par la voix du fidèle Thismonard, auquel un journaliste eut l’idée de rendre visite ; le confident répondait en substance :