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tout à gagner en faisant le jeu de l’hôtelière, et elle se résigna à accepter l’inévitable, c’est-à-dire à prêter son petit lit de fer à dame Jeanne pour qu’elle pût à son aise tromper maître Honoré.

Même elle commençait à s’apitoyer sur le sort de celui-ci, lequel était si cruellement traité, après avoir été trompé copieusement ainsi que tout le démontrait.

Ce sentiment nouveau éprouvé par Adèle n’était pas sans danger pour l’hôtelière. Mais celle-ci était persuadée que son époux, durant les cinq jours de jeûne qu’elle lui imposait, ne chercherait pas à s’approcher d’elle, et que s’il avait quelques velléités amoureuses, ce serait encore à la servante qu’il en voudrait faire hommage, ce contre quoi son amant saurait bien la prémunir.

Ah ! Ce n’était plus l’épouse fidèle qui se défendait tant la veille encore, contre les entreprises de son compagnon de voyage. Elle avait fait du chemin, dame Jeanne, sur la route de l’adultère, et elle n’entendait nullement retourner en arrière. On sait, d’ailleurs que sur cette route comme sur beaucoup d’autres, il n’y a que le premier pas qui coûte. Or, le premier pas était fait, et maître Honoré était définitivement entré dans la catégorie des maris trompés.

ix

Adèle a pitié de son Maître.


Le même jour, la belle hôtelière mit le galant notaire au courant des événements de la nuit. Me Robert fut très satisfait d’apprendre comment avait été confondu le patron de l’hôtel des Gais Lurons ; il fut non moins satisfait de savoir que la rousse Adèle n’avait point révélé ce qui lui était advenu alors qu’elle était encore dans le lit de sa patronne. Enfin il se montra joyeux d’apprendre que pendant cinq jours, dame Jeanne et lui pourraient à loisir profiter du petit lit de la servante.

Quant à maître Honoré, s’il ne disait mot, croyez-bien qu’il n’acceptait pas avec résignation le coup du sort qui s’était abattu sur lui ; maître Honoré s’était promis de se venger. Et la vengeance qu’il avait méditée visait la pauvre